Dans le cadre de la préparation de l’édition du journal de guerre d'un officier du 29ème bataillon de chasseurs à pied (août-septembre 1914), un historien consigne ses méthodes, ses pistes, ses sources, pour rassembler le maximum d’informations sur cette unité d’élite. Mais au-delà de ce travail, ce blog a aussi pour but de partager tous les renseignements récoltés au cours de ces investigations. Cette somme d'informations constitue un hommage à tous ces centaines de soldats, souvent très jeunes, blessés, tués, prisonniers ou portés disparus dès les premiers mois de la Grande Guerre.

vendredi 6 mars 2015

Les archives du Comité International de la Croix Rouge




  Les archives du CICR restent une source méconnue et peu utilisée. Numérisées et consultables en ligne, ce sont près de cinq millions de fiches de prisonniers et 500.000 pages de registres associés qui peuvent apporter de précieux renseignements. Quand on sait que, au cours de la première guerre mondiale, dix millions de personnes – militaires et civiles – furent capturées et internées dans des camps de détention, on mesure à quel point cette base est d’un intérêt majeur. En ce qui nous concerne, elle s’est avérée d’une grande utilité pour identifier de nombreux chasseurs dont nous ne connaissions que le patronyme. En effet, le journal des marches et opérations du 29ème BCP ne mentionne, généralement, que le nom de famille des chasseurs blessés, tué ou disparus. Rarement leurs prénoms. Ce qui rend les recherches extrêmement compliquées, pour ne pas dire vaines, quand il s’agit de retrouver leurs fiches matriculaires. Or, suite aux demandes des familles, la Croix Rouge a établi de nombreuses fiches au sujet de soldats français portés disparus, qu’ils aient été tués au combat ou qu’ils aient été internés en Allemagne.

 
Document n°1
Prenons un exemple. Dans le JMO du 29e BCP, le chasseur Gervaise (sans indication de prénom), de la 6ème compagnie, est noté parmi les disparus de la journée du 22 août 1914. En cherchant dans les fiches du CICR, au nom de Gervaise, on en trouve une concernant un certain Gervaise Edouard, soldat au 29 chass. à pied, 6ème [compagnie]. » Document n°1 Sur cette fiche figurent plusieurs références qui renvoient vers des listes de prisonniers. Sur l’une de ces listes on trouve des informations plus précises sur le prisonnier en question. Document n°2 : Il appartient au 29ème Bataillon de chasseurs à pied, 6ème compagnie, a été capturé le 23.08.1914 à Choupecourt (Joppécourt) et est né le 25.07.1892 à Chenu. Enfin, est notée l’adresse d’un correspondant en France : Mme Gervaise 44, rue du Bac à Paris. Chenu est une commune de la Sarthe. 
 

Document n°2
L’adresse parisienne nous incite plutôt à commencer nos recherches sur Paris. Sur le site des Archives de Paris on peut consulter les tables numérisées des états signalétiques et des services militaires de l’ancien département de la Seine. Sachant que cet Edouard Gervaise est né en 1892 et que l’âge normal du recrutement étant fixé à vingt ans, c’est la liste alphabétique des conscrits de l’année 1912 qui nous intéresse. Mais il y a six bureaux de recrutement pour la Seine. Le deuxième bureau nous livre enfin le matricule – 537 – d’un Edouard, Alexandre Gervaise. Le seul, dans les tables, à porter le prénom d’Edouard. Là s’arrête la cherche en ligne car il faut se rendre en salle de lecture, aux archives de Paris, pour pouvoir consulter les originaux des registres matricules (sous série D4R1). Le matricule 537 se trouve dans le registre coté D4R1 1672. Nous pouvons enfin consulter la fiche d’Edouard Gervaise. Documents n°3 et 4. 
 
Document n°3
 C’est bien le chasseur que nous recherchions. Il est né le 25 juillet 1892 à Chenu (Sarthe) et habite, en 1912, 48 rue de Bourgogne à Paris. Il exerce alors la profession de valet de chambre. Sa mère, veuve, réside aussi dans la capitale (44 rue du Bac). Le document nous apprend encore qu’Edouard Gervaise mesure 1,62m, qu’il a été incorporé au 29e BCP le 8 octobre 1913 et qu’il a disparu le 23 août 1914 à Audun-le-Roman. On lit ensuite qu’il a été en captivité à Gragenvorhr, en Allemagne, et qu’il a été rapatrié en France le 26 décembre 1918. La lecture de cette fiche nous apprend encore qu’il a été employé, après la guerre, aux chemins de fer (homme d’équipe puis aiguilleur). Enfin, pour achever sa biographie, il suffit de consulter l’état civil numérisé de Chenu Archives départementales de la Sarthe. Les mentions marginales qui figurent à côté de son acte de naissance indiquent qu’il s’est marié à Paris, le 18 octobre 1919, et qu’il y est décédé le 28 avril 1966 (15ème arr.).

Document n°4
 


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